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samedi 20 octobre 2012

Etude de cas n°2 : Le conflit d’intérêt




Par Gérard Faure-Kapper.
  
Ces études ne revendiquent qu’un but pédagogique. Il s’agit, à partir d’un exemple concret, d’inciter à raisonner selon une logique juridique. Les énoncés des problèmes ne s’appuient que sur des faits précis et prouvés. Nous ne citerons pas les études concernées mais nous donnerons certaines indications afin qu’elles se reconnaissent pour leur permettre d’analyser et de comprendre leurs actions. Le cas échéant, d’en tirer les conclusions et de prendre les mesures correctives nécessaires.
www.aplombfrance.fr


ETUDE DE CAS N°2 : Le conflit d’intérêt

Concerne l’étude d’un huissier situé à Paris 1er.
(Suite du cas n°1)


CONTEXTE.

Un client avait contracté un prêt chez Ménafinance. En 2009, des difficultés l’obligent à cesser les paiements pendant 3 mois.


ENONCE DES FAITS :

Début 2011, Ménafinance prononce la déchéance du terme du prêt cité dans le cas n°1 et mandate un second huissier parisien.

Il écrit une lettre avec l’entête de son étude en ces termes :

Je résume :



Cette somme est due à la date en référence pour un paiement immédiat et non fractionné


J’attire votre attention sur le fait que faute de règlement dans ce délai de huitaine, j’engagerai à votre encontre une procédure judiciaire dont les frais seront mis à votre charge.

Les intérêts sur les sommes précitées courent jusqu’au COMPLET REGLEMENT. »






ANALYSE :

Nous sommes dans une procédure extra judiciaire de «recouvrement amiable »

En théorie, l’huissier agit en tant que cabinet de recouvrement et non en tant qu’officier ministériel et public assermenté.

Pourtant, sa lettre à entête d’huissier lui permet d’entretenir auprès de sa victime l’illusion que la démarche est officielle.

L’objectif étant d’effrayer le client.

D’abord,

« Je suis chargé par Ménafinance de procéder au recouvrement des sommes indiquées ci-dessous : »

Il doit joindre le « mandat » donné par Ménafinance et son cadre juridique. Il ne le fait pas car la nature de sa démarche apparaîtra clairement au client.

« (Détail et total de 5.911,26€ pour une créance de 4.738,47€)
Cette somme est due à la date en référence pour un paiement immédiat et non fractionné »

La charge de l’huissier implique un devoir de diligence, de prudence et de vérification. De toute évidence il a manqué à son devoir sinon il serait tombé sur le vice de forme du contrat.

Pourtant, sans n’avoir rien vérifié, il affirme que cette somme est due. Dès lors, sa responsabilité est engagée.

Pour aller plus loin, en l’occurrence dans ce dossier, les intérêts étaient constitutifs d’un délit d’usure.

Nous pouvons déjà parler de : recel de délit d’usure par un officier ministériel et public assermenté dans l’exercice de ses fonctions.


« Il y a lieu désormais d’effectuer votre règlement A MON ETUDE par tout moyen à votre convenance et notamment par chèque bancaire ou mandat A MON ORDRE en indiquant les références de l’étude au dos. »

Vous devez les fonds à Ménafinance et non à cet huissier. Pour en être bénéficiaire, il doit joindre le mandat donné par l’organisme de crédit, en précisant qu’il est habilité à recevoir les fonds.

Pourtant, il ne le fait pas, ce qui constitue une nouvelle faute.

« J’attire votre attention sur le fait que faute de règlement dans ce délai de huitaine, j’engagerai à votre encontre une procédure judiciaire dont les frais seront mis à votre charge. »

Afin de vous presser pour le paiement, il va assortir sa lettre d’un chantage à la plainte. De plus, il affirme que les frais seront mis à la charge du client, alors qu’il est très rare qu’un juge les lui impute.



CONCLUSIONS ET DENOUEMENT

En résumé, voici la liste des fautes commises sciemment par l’huissier.

1°) Il utilise son titre d’huissier dans le cadre d’une mission de recouvrement amiable, dans un but évident de pression sur la victime.

2°) Il n’a diligenté aucune des vérifications imposées à sa charge sur la réalité de la créance et la bonne forme juridique des contrats.

3°) Il n’a pas joint à son courrier le mandat reçu par son donneur d’ordre.

4°) Il exige le paiement « à mon nom et à son ordre » sans que l’on sache si l’organisme de crédit lui a donné ce pouvoir d’encaissement.

5°) Il se rend coupable de menaces, d’intimidation et de chantage en affirmant comme vérités les conclusions hypothétiques du tribunal.


Soit vous estimez que la somme est due, dans ce cas vous vous rapprochez de l’organisme de crédit.

Soit vous voulez l’arbitrage de la justice, alors vous écrivez à l’huissier pour qu’il se fasse délivrer une ordonnance portant injonction de payer par le tribunal d’instance compétent.

Le recours contre l’huissier ne se fera utilement qu’après la décision de la Justice.


En l’occurrence, et dans ce cas d’étude, l’huissier a assigné sa victime devant le tribunal. Il s’est avéré que le client ne s’est pas présenté.

Le juge à vérifié la régularité du contrat et la réalité de la somme due.

Il s’est avéré qu’il a annulé le contrat pour vice de forme. Il a également prononcé la déchéance du terme des intérêts.

Ménafinance a été condamné à verser 8.700€ à son client au lieu des 5.911€ réclamés par l’huissier.


Cette affaire met en lumière le CONFLIT D’INTERET existant entre l’huissier agissant en tant que cabinet de recouvrement et ce même huissier dans sa fonction d’officier ministériel assermenté.



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